"Utiliser tous les leviers contre les discriminations", Stéphane Pallez, FDJ

Stéphane Pallez, présidente directrice générale de la Française des Jeux (FDJ), détaille les actions d'inclusivité au sein du groupe.

Par Chloé Consigny

À quelle date a été créée la direction Diversité et Inclusion au sein de FDJ ? Quelles actions ont été mises en place ?

J’ai pris mes fonctions en 2014 et la direction Inclusion et Diversité a été mise en place en 2015. En bâtissant mon plan stratégique à mon arrivée, j’ai immédiatement considéré qu’il y avait là un besoin d’agir et une opportunité. Le premier chantier a été celui de l’égalité femmes-hommes. Le constat était simple : la proportion de femmes managers au sein de notre organisation n’était pas au même niveau que celle des femmes au sein de la population globale des salarié·es. Nous nous sommes donnés pour objectif d’atteindre 40 % de femmes managers et nous y sommes parvenus. Nous avons par ailleurs créé un budget spécifique destiné à réduire l’écart salarial entre les femmes et les hommes. Je suis convaincue que sur le volet de l’inclusion et de la diversité, il faut se donner des objectifs précis dans un horizon de temps et se doter de moyens de mesure. C’est la seule façon de progresser dans la durée.

En tant que femme à la tête d’une grande entreprise, vous sentez-vous détentrice d’une mission particulière ?

Le sujet de l’égalité entre les femmes et les hommes fait partie de mon parcours. En tant que femme dirigeante, je suis regardée et je me sens une forme de responsabilité. Je dois donc utiliser tous les leviers possibles pour faire progresser l’inclusion et lutter contre les discriminations. Pas seulement parce que cela me tient à cœur à titre personnel, mais aussi parce que cela est fondamental pour la performance de l’entreprise que je dirige. Un homme dirigeant d’entreprise pourrait tout à fait faire ce que je fais et heureusement beaucoup s’y sont engagés ! Je fais naturellement le lien avec l’inclusion des personnes LGBTQI + car je pense que, comme beaucoup de femmes, je suis plus sensible à toute forme de discrimination. Avec les minorités en entreprise, il faut procéder comme nous l’avons fait avec l’égalité hommes-femmes. Tout d’abord, reconnaître que c’est un sujet de discrimination sur lequel l’entreprise doit être très vigilante, puis aborder progressivement, un par un, les différents aspects avec des mesures de résultats.

Quelles actions avez-vous mises en place en faveur de l’inclusion des personnes LGBTQI + au sein de votre organisation ?

Nous n’en sommes encore qu’au début mais nous avançons avec détermination. Tout a commencé par des messages de collaborateurs qui ne comprenaient pas que FDJ ne s’empare pas de ce sujet. Ainsi, le 16 juin 2022, nous avons organisé une prise de parole dans l’entreprise. Nous avons notamment accueilli dans nos murs le footballeur Ouissem Belgacem, auteur de l’ouvrage « Adieu ma honte ». Pour pouvoir être pleinement intégré dans son équipe, il a même dû prétendre qu’il faisait « la chasse aux homosexuels ». Il nous a fait prendre conscience que ne pas pouvoir parler de ce sujet était une forme d’exclusion. Par exemple, une personne qui pense qu’elle n’a pas la liberté de déclarer son conjoint sur les documents administratifs de son entreprise subit une forme de discrimination. Il y a donc bel et bien un sujet de reconnaissance dans l’entreprise sur lequel il faut travailler. C’est pourquoi nous avons signé la charte d’engagement LGBT+ le 14 juin 2023.

L’histoire de FDJ est singulière : la Loterie nationale a été créée en 1933 afin d’aider les gueules cassées, ces invalides de guerre qui ne bénéficiaient alors d’aucune aide d’Etat. Que reste-t-il de cet héritage ?

Notre entreprise, par ses origines, est ancrée dans la conviction qu’elle est dotée d’un rôle sociétal. Nous venons d’un modèle de redistribution dans lequel les loteries permettent de financer des causes sociales. FDJ est la preuve que la performance financière peut être au service de l’impact social. Nous sommes aujourd’hui détenteurs d’un engagement historique que nous continuons de porter, notamment via le sport. Ainsi, FDJ est sponsor dans le cyclisme d’une équipe masculine et d’une équipe féminine. Lorsque nous nous sommes lancés dans le cyclisme féminin, il y avait peu de sponsors, alors qu’en réalité, beaucoup de gens s’y intéressent. Par exemple, après des années de militantisme, le Tour de France féminin existe de nouveau et le public est au rendez-vous. De même, en vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, nous sponsorisons depuis 2019, avec la « FDJ Sport Factory », une équipe de cinquante-deux athlètes, dont onze athlètes paralympiques. Cet investissement dans le sport et son impact dans la société disent beaucoup de ce que nous sommes.

Par le nombre de clients (25 millions), FDJ a une visibilité importante. Comment vous en emparez-vous ?

Notre puissance médiatique nous permet de rendre visibles les sujets que nous portons et de faire progresser une société plus inclusive. À titre d’exemple, lors du DuoDay, (journée destinée à favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap dans le monde professionnel, NDLR), nous avons reçu Hamid Allouache, qui a coprésenté une émission de tirage Loto. Danseur et paraplégique, il s’emploie à rendre visibles les minorités. Pour l’occasion, le studio était décoré de photos sur lesquelles on le voit danser en duo. Le tirage du Loto, en soirée et à une heure de grande écoute, représente un mode de communication puissant. C’est pourquoi nous avons souhaité utiliser ce canal pour mettre en avant les causes qui nous sont chères auprès du grand public.