La vie professionnelle n’est jamais déconnectée de la vie personnelle. Lorsque le pire advient (deuil, maladie, accident, agression…), il devient difficile - voire impossible - de poursuivre sa vie professionnelle. Après le temps de la pause, mon entreprise peut-elle participer à ma reconstruction ?
Par Isabelle Pailleau, Psychologue du travail, dirigeante de la Fabrique à Bonheurs
Face à un accident grave : deuil, maladie, discrimination, harcélement chaque individu réagit différemment. Au-delà des traumatismes physiques, se trouvent des mécanismes émotionnels de repli sur soi et d’isolement. Des mécanismes psychologiques (développement de phobies, par exemple) peuvent également advenir et s’inscrire dans le temps long.
Les manifestations d’un traumatisme sont multiples et peuvent prendre des formes variées. Certaines personnes seront sujettes au stress post-traumatique, d’autres à l’anxiété et à la dépression, d’autres encore aux cauchemars ou aux flash-back.
Enfin, des manifestations émotionnelles et physiques peuvent advenir, telles qu’une accélération du rythme cardiaque, des difficultés respiratoires ou encore des pleurs incontrôlables…
Vie personnelle et vie professionnelle
Par mécanisme de protection, ce qui nous atteint personnellement est rarement partagé en entreprise. Néanmoins, lorsque ce qui nous arrive est si grave que cela nous empêche de faire notre travail, il convient de se poser les bonnes questions.
Prenons le cas d’un décès. Le code du travail accorde trois jours de congés pour décès en cas de disparition d’un·e conjoint·e, partenaire lié·e par un pacs, parent, frère ou sœur.
Lorsque le décès ne concerne pas un membre de la famille, aucun jour de congé n’est accordé.
Cette disposition légale permet à la personne de s’organiser administrativement, mais elle ne permet en aucun cas de faire le deuil de son proche.
Le danger du secret
Parler va permettre d’informer les personnes avec lesquelles vous travaillez. Elles comprendront alors les raisons pour lesquelles vous ne parvenez plus à vous mobiliser. Parler, c’est prendre un risque, celui de s’exposer à d’éventuels propos maladroits et de se montrer vulnérables.
Mais c’est aussi l’occasion de libérer la parole. Certaines personnes ayant connu la même souffrance viendront sans doute naturellement à vous. Ce sera le moyen de partager vos expériences et de vous constituer un réseau d’allié·es au sein de l’entreprise.
La parole libérée ne suffit pas à récupérer après un traumatisme.
S’il n’existe pas de formule magique, différentes actions peuvent être mises en place, à différents niveaux.
C’est finalement un faisceau d’actions qui peut permettre, à terme, d’aider la personne à retrouver peu à peu un bien être mental et émotionnel :
· Sortir de l’isolement (voire de la honte) en communiquant sur son état pour adapter son travail au mieux
· Mettre en place une reprise progressive, prendre des pauses régulières, placer un cadre clair sur ses possibilités de travail (charges, responsabilités)
· Identifier les soutiens en interne (manager, collègues, DRH)
· Mettre en place une régularité dans son emploi du temps, voire des routines
· Se fixer des objectifs réalisables
· Mettre en place un suivi thérapeutique (EMDR, intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires, consultation psychologique …)