« Nous nous devons de prendre la parole dans le débat public »,Antoine Sire, Directeur Engagement chez BNP Paribas

« Nous nous devons de prendre la parole dans le débat public »,Antoine Sire, Directeur Engagement chez BNP Paribas

Plus connu du grand public comme historien du cinéma et acteur occasionnel, Antoine Sire pilote l’engagement sociétal et la politique d’inclusion de BNP Paribas. Il revient sur les mesures prises par le groupe en faveur des droits LGBTQI+.

Par Aimée Le Goff

Vous travaillez chez BNP Paribas depuis plus de vingt ans. Comment avez-vous vu évoluer les questions d’inclusion et de diversité ?

Tout a commencé avec notre volonté d’œuvrer pour plus de parité. Nous avons soutenu la création du réseau MixCity pour encourager la promotion des femmes aux postes de cadre. Quand je suis entré à la BNP en 1997, les 100 principaux cadres étaient presque tous des hommes blancs de plus de 55 ans. Aujourd’hui, notre comité exécutif compte près de 40% de femmes et nous visons un objectif de 50%. Pour faciliter l’inclusion des collaborateur·ices LGBTQI + en interne, le réseau Pride de BNP Paribas a été lancé en 2009 au Royaume-Uni, où le groupe est très présent, puis en 2015 en France. Il s’est développé dans d’autres pays et compte désormais 4000 membres. Nous avons aussi une politique de ressources humaines dédiée aux personnes trans, avec une équipe qui suit le sujet de très près.

La filière bancaire compte parmi les secteurs les moins inclusifs pour les personnes LGBTQI +. Que faites-vous pour vous démarquer ?

Très tôt, nous avons pris des positions publiques en faveur de la communauté LGBTQI + malgré de nombreuses protestations de clients, militants de la Manif pour tous. En 2018, nous étions sponsors des Gay Games à Paris. En tant qu’allié, je présidais la délégation de notre équipe, ce qui en disait long sur notre positionnement contre les LGBT-phobies. Nous avons ensuite pris des initiatives en matière de relation client. Depuis 2021 il est possible de supprimer sa civilité et de changer de prénom sur sa carte bancaire sur simple demande. Nous avons créé une carte bancaire LGBT-friendly dans le cadre de notre programme « À chacun son image », qui propose aussi de verser une cotisation annuelle à une association de lutte contre les LGBT-phobies. Notre filiale Nickel propose par ailleurs une fonctionnalité Mastercard, « True Name », qui permet aux personnes trans et non binaires de choisir le prénom à indiquer sur leur carte de paiement.

En parallèle de vos fonctions, vous vous intéressez à l’histoire du cinéma. Les représentations LGBTQI + ont évolué dans ce secteur. Y voyez-vous le reflet d’une émancipation dans notre société, et dans le monde de l’entreprise ?

Bien sûr. Avec un regard d’historien, je me suis intéressé à l’âge d’or d’Hollywood, période durant laquelle le cinéma américain était en proie à une grande censure. Il interdisait de représenter l’homosexualité. Les scénaristes employaient des stratagèmes pour intégrer des formes de « sous-textes » qui passaient à travers la censure. Même à l’époque où celle-ci était très forte, il y avait une réelle volonté des gens du cinéma de faire passer leur message. C’est intéressant de voir que petit à petit, le septième art a fini par s’ouvrir à la réalité.

Que reste-t-il à faire ?

Nous sommes présent·es dans de nombreux pays où les droits des personnes LGBTQI + ont malheureusement reculé, par exemple en Pologne ou au Brésil. Le combat est permanent car le risque de recul existe toujours. En 2019, aux États-Unis, nous avons co-signé avec 200 entreprises un amicus brief, une motion présentée à la Cour suprême, pour manifester l’importance que nous accordons à la protection des lois LGBTQI + dans le monde du travail. Nous nous devons de prendre la parole dans le débat public chaque fois que nous le pouvons.