No Pinkwashing : comment distinguer les entreprises qui s’engagent réellement en faveur de la diversité ?

No Pinkwashing : comment distinguer les entreprises qui s’engagent réellement en faveur de la diversité ?

A l’heure où toutes les entreprises prônent les valeurs de diversité et d’inclusion, pas facile pour un candidat de savoir si l’entreprise qu’il convoite s’engage sincèrement en faveur de l’inclusion. A l’occasion de TÊTU Campus, les directeurs ressources humaines et responsables diversité et inclusion de trois grands groupes sont venus partager leur expérience. Si tous s’entendent sur la nécessité de mettre en place des politiques d’inclusion et de diversité, les actions mises en place différent selon les groupes. Retours d’expériences et partage de bonnes pratiques.

Par Chloé Consigny

Qu’est-ce que le pinkwashing ? A cette question, Jean-Louis Carves, Diversity & Inclusion Engagement Partner, IBM a une réponse très tranchée « C’est tout simplement de la malhonnêteté. On parle ici de pouvoir être soi-même au travail. Une entreprise ne peut pas vendre de l’authenticité au travail si elle n’est pas elle-même authentique et sincère dans les valeurs qu’elle défend. Heureusement, cela ne dure jamais longtemps. Les candidats et notamment les jeunes générations ont désormais les moyens – via des réseaux sociaux tels que Glassdoor – de savoir si l’entreprise est réellement authentique dans ses croyances et dans ses actions. On ne peut pas afficher des engagements forts alors que l’on n’a pas le commencement du début d’une preuve ! ». D’autres, sont plus nuancés, à l’instar de Caroline Courtin, Head of Diversity, Equity & Inclusion, BNP Paribas : « Il faut bien avoir à l’esprit que la communication précède souvent l’action. Une communication très forte peut entrainer derrière des actions. A mon sens, dès qu’il y a des collaborateurs qui à l’intérieur d’une entreprise prennent la parole sur ces sujets pour dire à quel point ils se sentent bien, c’est un gage qu’il n’y a pas de pinkwashing ».

Entrée sur les thématiques de l’inclusion par petits pas…

Pour s’emparer de la thématique Inclusion & Diversité, chaque entreprise a élaboré sa stratégie en interne. IBM a choisi une entrée progressive, comme l’explique Jean-Louis Carves « Je pense qu’il faut avancer humblement et par petits pas. Chez IBM par exemple, nous avons débuté par une prise de conscience au plus haut niveau de l’entreprise. La porosité entre vie au travail et vie personnelle est de plus en plus palpable. Nous nous devions donc de prendre en compte les individus dans leur globalité afin de leur offrir un cadre de travail épanouissant. Une signature de chartre peut être un événement de lancement mais il ne peut en aucun cas suffire. Derrière la signature de chartre il faut déployer, former, éduquer et embarquer l’ensemble des collaborateurs ». Même constat du côtéd’AB InBev, groupe brassicole belgo-brésilien qui a choisi d’avancer par petits pas : « nous avons commencé ces discussions relativement tardivement. La plus grosse difficulté est d’arriver à trouver le bon mélange entre une clarté du management et du comex et l’impulsion des équipes. Il nous a fallu du temps pour trouver le bon équilibre. Il faut assembler les deux et mettre en place des directions claires au niveau Comex tant au niveau international que national », explique Florestan Falize, DRH France.

… ou avec fracas

D’autres, en revanche, ont commencé plus fort. C’est le cas du groupe bancaire BNP Paribas qui, en signant la chartre de l’Autre Cercle a dû faire face à un flot de critiques et d’insultes : « à l’issue de la signature de la chartre, plus de 10 000 mails ont été envoyés aux dirigeants. Jean-Laurent Bonnafé (administrateur et directeur général du groupe, NDLR) a reçu des mails aux propos très violents. Certains clients ont même menacé de fermer leurs comptes », se souvient Caroline Courtin, Head of Diversity, Equity & Inclusion, BNP Paribas qui ajoute cependant : « un client très fortuné néanmoins nous a remercié d’avoir signé cette chartre et de nous engager sur le sujet des LGBT+. Il nous a même dit : si vous n’aviez pas signé, je serai parti ».

Concrètement : quelles actions sont mises en place ?

Pour sensibiliser en interne des collaborateurs a priori peu concernés par les sujets LGBT +, chaque entreprise met en place une stratégie différente. Chez Ab InBev, c’est l’humilité qui prime : « nous n’avons pas la prétention de tout connaitre. Nous avons donc choisi de nous faire accompagner par TÊTU Connect. A mon sens ce genre d’initiative rend la démarche beaucoup plus crédible. En effet, ce n’est pas le DRH ou la direction générale qui prend la parole, mais des experts qui viennent avec leur vécu et cela fait sens auprès de nos collaborateurs », constate Florestan Falize, dont le groupe présent au niveau mondial compte 250 collaborateurs en France. BNP Paribas avec ses 60 000 collaborateurs en France s’inspire des initiatives mises en place dans d’autres pays et profite des événements pour communiquer. « Nous avons la chance d’avoir des réseaux pride dans 22 pays. Cela nous aide à diffuser les bonnes pratiques et à échanger autour de nouvelles idées. Nous mettons régulièrement en place des semaines de la diversité à l’occasion desquelles nous traitons de sujets divers tels que le coming-out en entreprise ou encore les familles homoparentales », explique Caroline Courtin qui précise : « nous avons inclus dans nos accords d’entreprise un volet concernant l’accueil de l’enfant. Cela s’adresse aux parents ayant recours à la GPA mais également aux parents adoptants ».

A l’instar d’une adoption ou d’une GPA, une transition est un événement de vie qui concerne l’entreprise qu’elle le veuille ou non.


Jean-Louis Carves, Diversity & Inclusion Engagement Partner, IBM

Congés exceptionnels pour parcours de transition

Le groupe IBM va encore plus loin et accompagne ses collaborateurs en transition : « nous avons démarré relativement tôt sur le sujet, car, au niveau mondial, nous comptions une dizaine de cas chaque année. Nous avons donc décidé de mettre en place des process RH permettant notamment de régler les questions administratives. Chaque pays est désormais doté d’un correspondant transidentité. Celui-ci est équipé, c’est-à-dire qu’il est formé à recevoir la parole d’un collaborateur qui l’informe de sa transition. Il est celui qui fait le lien avec les équipes et les managers et accompagne le collaborateur tout au long de son parcours de transition. A l’instar d’une adoption ou d’une GPA, une transition est un événement de vie qui concerne l’entreprise qu’elle le veuille ou non. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé d’allouer une dizaine de jours de congés exceptionnels sur un parcours de transition ».

Coté candidat : ne jamais se contenter du déclaratif

Et côté candidat ? Comment faire pour s’assurer de la sincérité de l’engagement auprès de laquelle on s’apprête à travailler. Bien qu’il soit lui-même DRH, Florestan Falize conseille de se rendre au plus près du terrain et de ne pas se contenter du discours officiel : « A mon sens, le meilleur conseil que l’on m’ait donné est de discuter directement avec les collaborateurs et non pas seulement avec les responsables ressources humaines. A leur contact, il est plus facile de sentir l’ambiance générale d’un groupe. Cela permet de savoir si l’entreprise fait plus qu’elle ne dit ou non ».