Si on lui avait proposé cet entretien il y a trois mois, Guillaume Navarro aurait simplement refusé. « A l’époque, je n’avais pas mesuré l’impact que pouvait avoir la prise de parole d’une personne comme moi, qui s’affiche telle qu’elle est sur son entourage professionnel », explique-t-il. Le déclic a lieu le 27 juin 2022. A cette date, se tient le tout premier événement du réseau LGBTQI+ et allié·es de CELINE, « ALL PRIDE CELINE ».
Par Chloé Consigny
Près de 80 collaboratrices et collaborateurs assistent aux débats au cours desquels Guillaume Navarro prend la parole et évoque brièvement le cheminement qui l’a mené à ne plus cacher son orientation affective et sexuelle sur son lieu de travail. « A l’issue de cet événement, quatre personnes sont venues me voir, principalement des jeunes. Ils m’ont confié leurs doutes et leurs hésitations. Cela m’a beaucoup marqué. J’ai alors pris conscience de l’importance des rôles modèles. J’ai également compris qu’il n’était pas nécessaire d’être particulièrement inspirant ou charismatique pour avoir un impact. A un moment donné dans ma carrière j’aurais, moi aussi, aimé savoir que je n’étais pas seul ».
« Mes stratégies pour ne pas révéler mon orientation affective me demandaient beaucoup trop d’énergie »
A 34 ans, Guillaume Navarro est aujourd’hui Responsable Expérience Collaborateur et RSE chez CELINE. Un poste qui n’est pas sans lien avec son cheminement personnel. Il grandit dans une famille parisienne conservatrice et apprend vite ses leçons. « Je me donnais beaucoup de mal pour être le plus discret possible et pour rentrer dans un moule que je pensais être la norme », se souvient-il. Autre constante dans son parcours : son envie féroce d’aider, d’être utile, au plus proche de celles et ceux qui souffrent. Dès ses premières années d’études supérieures, il s’engage auprès d’associations qui œuvrent pour rompre l’isolement des séniors et des enfants hospitalisés. Ce n’est qu’à l’âge de 21 ans qu’il fait son premier coming-out. Un coming-out d’abord à lui-même. Un peu plus tard, il commence à envisager sa vie en étant out. « C’est au cours d’un séjour humanitaire au Mexique que j’ai rencontré des bénévoles venus du monde entier, pour lesquels la question de l’orientation sexuelle était un non sujet. Cela a été un premier déclic. Il m’a néanmoins fallu beaucoup de temps.», se souvient-il. Après des études en école de commerce et au CELSA, il rejoint le Bon Marché en 2012, en qualité de Chargé de Communication Interne avant d’être promu Responsable Communication Interne et Expérience Collaborateur. Si au cours des premières années il adopte une posture de caméléon, par peur de froisser ses interlocutrices et ses interlocuteurs, au fil du temps, il gagne en assurance. « L’année de mes 30 ans a été une année structurante au cours de laquelle j’ai beaucoup questionné mes croyances. A partir de ce moment-là, j’ai décidé de me montrer tel que j’étais. J’ai pris conscience que mes stratégies pour ne pas révéler mon orientation affective me demandaient au quotidien beaucoup trop d’énergie ». Pas question pour autant de revendiquer ou d’en faire des tonnes. Il reste discret. Ce qui change néanmoins c’est qu’il n’élabore plus de stratégies pour changer les pronoms lorsque, sur son lieu de travail, il évoque sa vie personnelle. Un changement mineur dans ses relations aux autres mais majeurs pour son épanouissement : « je me sens plus libre, plus apaisé et finalement, je constate que j’attire à moi des personnes bien plus authentiques qu’auparavant ».
« Intégrer dans mon quotidien mon envie de rendre le monde meilleur »
En 2019, il rejoint CELINE, d’abord en qualité de Responsable Communication Interne. A son arrivée au sein de la Maison, il se fait la promesse de ne pas se travestir et de rester qui il est. « Au quotidien, je suis alimenté par les rencontres. L’humain est pour moi un véritable moteur. J’ai donc rempli mes missions en prenant en compte cette singularité. Ainsi, les projets que j’ai menés en communication interne étaient, autant que possible, dotés d’un volet collaboratif et animés par la volonté de donner un supplément d’âme, d’être dans la générosité et la reconnaissance pour nos équipes », détaille-t-il. Sous la supervision bienveillante de la Directrice des Ressources Humaines, il s’épanouit au travers de différents projets. A tel point qu’en février 2020, il est promu Responsable Expérience Collaborateur et RSE. « J’ai bien conscience qu’on ne change pas le monde au sein d’une entreprise, néanmoins j’avais réellement besoin de me sentir utile et de travailler pour des projets porteurs de sens. Mon engagement associatif ne m’a jamais quitté. En intégrant la RSE dans le spectre de mes missions j’ai pu intégrer dans mon quotidien cette envie de rendre le monde meilleur », explique-t-il.
« Ce sont nos singularités qui font la valeur de nos Maisons »
Lorsqu’il est question de formaliser la stratégie RSE de la Maison au travers de #CELINECARES, il applique les mêmes recettes et embarque les collaborateurs et les collaboratrices , au travers de conférences, d’ateliers, de rencontres… « Nous avons ainsi pu définir les piliers de la Maison et dessiner des engagements réellement portés par l’ensemble des collaborateurs et des collaboratrices de la Maison. Nos engagements sociaux et environnementaux sont ambitieux, à la hauteur de l’engagement des équipes CELINE », détaille-t-il. Il est également à l’initiative de la création du réseau LGBTQI + et allié·es de CELINE qui rassemble aujourd’hui une cinquantaine de personnes, et est fier d’avoir rejoint le réseau All Pride LVMH en tant qu’Ambassadeur. Convaincu que ce sont les singularités de chaque collaborateur et de chaque collaboratrice qui font la valeur d’une Maison, il s’emploie à créer un environnement toujours plus inclusif.
