Directeur·trice inclusion et diversité, un métier d’avenir

Directeur·trice inclusion et diversité, un métier d’avenir

Depuis une quinzaine d’années, les grands groupes comptent dans leur rang des responsables diversité et inclusion. Qui sont ces professionnels en charge de l’inclusion ? Quelles sont leurs compétences et quel est concrètement leur champ d’action ? Focus sur un métier qui devrait être amené à se développer au cours des prochaines années.

Par Chloé Consigny

Un déploiement récent

Au sein des grands groupes du CAC 40, les premiers responsables diversité et inclusion ont été nommés il y a une quinzaine, voire une vingtaine d’années, selon les entreprises. Parmi les précurseurs se trouvent des noms tels que La Macif, L’Oréal, EDF ou encore BNP Paribas. A l’origine, l’émergence de cette nouvelle fonction est largement portée par l’évolution de la réglementation et notamment par l’adoption de l’accord intersyndical de mars 2004, relatif à la mixité et à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Le titre exact est alors souvent celui de directeur ou responsable égalité. Parfois, le terme « diversité » est accolé à la fonction, permettant d’englober les personnes en situation de handicap, et ce n’est que très récemment qu’apparait la notion d’inclusion. Ainsi, chez Orange, le mot « inclusion » a été ajouté au titre il y a deux ans, lorsque Delphine Pouponneau a pris ses fonctions. Initialement rattachés aux directions ressources humaines, voire à la communication interne, ces postes sont peu à peu remontés plus haut dans l’organigramme. Chez Orange, la directrice diversité et inclusion est rattachée à la direction Responsabilité Sociétale, mais travaille en lien étroit avec la direction des ressources humaines. « Il ne peut y avoir de performance durable s’il n’existe pas au sein de l’entreprise une politique de diversité et d’inclusion », souligne Delphine Pouponneau, directrice de la Diversité et de l’Inclusion du groupe Orange. Chez BNP Paribas, la direction diversité, égalité et inclusion est rattachée à la Direction des ressources humaines et participe au Comité exécutif de l’engagement de l’entreprise.

Une fonction encore limitée aux très grandes entreprises

Les responsables inclusion et diversité sont, en revanche, quasi inexistants au sein des petites structures. Faute de temps, de moyens, les dirigeants peinent à embraser ces sujets, sauf cas particulier, par exemple, lorsque le dirigeant d’entreprise est lui-même personnellement engagé sur ces thématiques. « Il faut bien avoir à l’esprit que les petites et moyennes entreprises peinent déjà à s’engager sur les questions d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de handicap. La question de l’inclusion n’arrive qu’après », constate Isabelle Delcroix Naulais, directrice et fondatrice du cabinet Lidup. Au sein des organisations publiques, l’évolution est lentement en marche. Pour preuve, le secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les hommes et les femmes est désormais directement rattaché au Premier ministre.

Quelles prérogatives et quels moyens pour ces experts de l’inclusion et de la diversité ?

Le métier étant relativement nouveau, la fiche de poste n’est pas fixe. Elle varie fortement selon les entreprises et les organisations. Tous ont pour mission de « déterminer les grands axes de la stratégie diversité au sein de l’entreprise ». Une prérogative vaste qui recouvre différents chantiers : égalité professionnelle hommes / femmes, égalité des chances des personnes en situation de handicap, insertion des seniors dans l’emploi ou encore lutte contre les LGTB phobies. Pour ce faire, la plupart des directions misent sur la sensibilisation et la formation. A titre d’exemple, certains experts diversité et inclusion seront amenés à avoir un œil sur le recrutement du top management, cherchant à éviter la présélection de « clones » (même écoles, même genre, même origine…) pour un nouveau recrutement. Enfin, sur l’efficacité de la fonction, elle est fonction de plusieurs paramètres. « Tout d’abord, il faut que le poste soit porté au plus haut niveau de l’entreprise. Il faut ensuite que les collaborateurs s’emparent eux-mêmes du sujet, enfin, l’efficacité dépend largement de la ligne budgétaire allouée », souligne Isabelle Delcroix Naulais.

Quel parcours avant de devenir responsable diversité et inclusion ?

Les professionnels interrogés ont tous auparavant été en poste au sein de services ressources humaines, à différents niveaux. Une constante néanmoins, une appétence très forte pour le sujet voire un engagement personnel : « il arrive souvent qu’il s’agisse souvent de personnes ayant été elles-mêmes victimes de discriminations », constate Isabelle Delcroix Naulais. Dans tous les cas, les directeurs.trices diversité et inclusion n’œuvrent jamais seuls. Ils sont dotés d’une équipe (5 à 6 personnes en moyenne) et travaillent de concert avec des référents inclusion et diversité dans chacune des filiales et des divisions du groupe. Ceux-ci sont souvent des professionnels ressources humaines qui, dans leur fiche de poste, sont également dotés d’un volet diversité et inclusion. Aux premiers échelons, les profils jeunes diplômés en ressources humaines sont très recherchés. A noter, pour l’heure, il n’existe pas encore de formation initiale diplômante sur ces sujets. Les formations se font souvent en poste, au fil de la carrière des collaborateurs et selon les affinités. Autre constante, aux plus hauts niveaux, les responsables et directeurs.trices sont pratiquement exclusivement que des recrutements internes. « Chaque entreprise à un niveau de maturité très différent sur ces sujets. D’où l’importance que les postes de management soient occupés par des personnes connaissant parfaitement la culture d’entreprise, les acteurs et l’écosystème », explique Anne Saüt, directrice générale du cabinet Diversity Conseil RH.

Quels retours sur investissements ?

Pour les grands groupes, l’investissement humain et financier est réel. Aux directeurs s’ajoutent de nombreux référents, soit en moyenne près d’une quarantaine de personnes mobilisées partiellement ou totalement sur ces sujets, pour les sociétés du CAC 40. Des efforts stratégiques dont les retours sur investissement sont attendus. Des baromètres existent permettant de mesurer les progrès de l’inclusion en entreprise. Cependant, au-delà de ces éléments chiffrés, la première mesure est visible, via la diversité des profils au sein des équipes. « A mon sens, le retour sur investissement est difficile à mesurer mais se voit surtout au niveau de l’innovation et de la capacité à se transformer. Prenons l’exemple d’un groupe tel que LVMH qui s’est très tôt engagé sur ces sujets en n’hésitant pas à cultiver la singularité en recherchant des profils atypiques. Grâce à ces nouveaux talents, le groupe s’est clairement démarqué face à ses concurrents en affichant plus d’innovation et de créativité. Une équipe aura en effet beaucoup plus de chances de trouver une idée nouvelle lorsqu’en son sein se côtoient des profils variés et complémentaires, de différentes nationalités », conclut Anne Saüt.