Que faut-il retenir des six premiers mois de l’année 2025 ? En matière de diversité et inclusion, l’année a été marquée par des avancées manifestes, mais aussi et surtout par de violents reculs, notamment en provenance des Etats-Unis. Décryptage des éléments à retenir.
Par Chloé Consigny
Aux Etats-Unis, une vague législative anti-trans
Dans 18 États américains, de nouvelles lois restreignant les droits des personnes trans ont été adoptées depuis janvier 2025, portant à près de 600 le nombre de textes législatifs anti-LGBT+ introduits depuis 2022, selon la cartographie évolutive, réalisée par l’ACLU – American Civil Liberties Union. Les personnes trans sont particulièrement touchées par ces reculs législatifs. Certains États ont ainsi instauré des lois visant l’interdiction ou la restriction de soins médicaux d’affirmation de genre pour les mineur·es, pouvant, dans certains cas, entraîner la criminalisation des professionnels de santé. 19 États américains appliquent désormais l’interdiction pour les personnes trans d’accéder aux vestiaires ou aux toilettes ou vestiaires correspondant à leur identité de genre dans les bâtiments publics, écoles, universités et prisons.
Dans le monde, la situation ne s’améliore pas
Parmi les 193 pays membre de l’Organisation des Nations unies, l’homosexualité reste réprimée par la loi dans 64 pays, selon les données 2025 de l’Association internationale des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et intersexes (Ilga World). En 2024–2025, l’ONU et des ONG rapportent par ailleurs une recrudescence des lois punitives visant non seulement les actes homosexuels, mais aussi la « promotion » ou « expression LGBTQI + », avec des conséquences sanitaires notables, telles que le ralentissement de la lutte contre le VIH.
Une dynamique européenne sous pression
Sous la pression politique et juridique, de nombreuses entreprises américaines ont considérablement réduit ou abandonné leurs engagements en matière de Diversité, d’Equité et d’Inclusion (DEI). Au premier rang desquels se trouvent les géants de la Tech, mais également les mastodontes de la grande distribution et du secteur automobile, à l’instar de Walmart et de Ford. L’Europe n’a pas été exempte des vents violents en provenance de l’autre côté de l’Atlantique. Fin mars, les entreprises françaises ainsi que britanniques – comptant parmi leurs clients l’ambassade américaine – découvraient avec étonnement un courrier signé de la main d’un dénommé Stanislas Parmentier. Cette missive demande aux fournisseurs de la représentation étasunienne en France de renoncer à tout programme de promotion de diversité et d’inclusion, sous peine de ne plus pouvoir contracter avec l’ambassade.
Toutes les entreprises n’ont cependant pas cédé aux injonctions américaines. Celles qui travaillent principalement sur le marché français ont maintenu leurs engagements. Idem pour celles qui évoluent principalement au sein d’un marché européen. Les plus dépendantes des Etats-Unis, en revanche, ont dû montrer patte blanche, sous peine de perdre de précieux marchés. Certaines ont fait le choix de se faire plus discrète, effaçant de leurs sites Internet leurs actions D&I, mais continuant localement à les mettre en place. C’est le cas notamment des cabinets de conseils.
En France, des LGBTphobies qui ne reculent pas
Difficile cependant de croire que le recul planétaire est du seul fait étasunien. L’opinion publique est de moins en moins sensible aux sujets LGBTQI +, comme en attestent les résultats de l’étude Global Advisor « Pride », réalisée par Ipsos à l’occasion du mois des fiertés. Dans le monde, désormais, seul·e·s 41% des consommateurs voient d’un bon œil les marques qui promeuvent l’égalité LGBT+. Un chiffre en baisse de 8 points depuis 2021. Autre constat notable : seuls 38% des salarié·es en France soutiennent les politiques spécifiques d’inclusion à destination des employé·es LGBT+ (en baisse de 8 points en 4 ans), tandis que 24% y sont désormais hostiles.
Conséquemment, les salarié·es LGBTQI+ se sentent de moins en moins enclins à faire état de leur identité en entreprise. Selon le baromètre Out@Work réalisé par le cabinet de conseil BCG en partenariat avec têtu•, en 2025, 48 % des personnes interrogées et concernées affirment avoir fait leur coming-out auprès de l’ensemble de leurs collègues. Un pourcentage en repli de 6 points par rapport à 2018. Être perçu comme LGBTQI + sur son lieu de travail est désormais considéré comme un désavantage par 30 % des sondés.
Polarisation à la française
En France, les actes de LGBTphobies continuent de progresser. Selon les chiffres compilés par SOS Homophobie et le Ministère de l’intérieur, en 2024, 4 800 infractions à caractère homophobe ou transphobe ont été enregistrées, soit une hausse de 5% par rapport à 2023. Les hommes restent les principaux auteurs (83 %) et victimes (72 %) de ces actes, tandis que les plaintes restent très peu nombreuses au regard de la réalité. Selon le ministère de l’intérieur, seules 4 % des victimes portent plainte.
Enfin, l’étude annuelle Le Refuge x BVA Xsight nous apprend que 41 % des Français·es réagiraient mal si leur enfant était transgenre. Un chiffre en progression de 4 points sur un an. Par ailleurs, une très grande majorité (59 % des personnes LGBTQI +) estime ne pas être bien intégrée dans la société française.
En 2025, 10 % de la population française se déclare LGBTQI+. Un pourcentage qui atteint 22 % au sein de la Gen Z (personnes nées en 1997 et après). Des pourcentages qui reflètent une réalité : les personnes queers sont désormais bien plus visibles qu’auparavant.